Le libre échange et l’argent dette

Le libre échange et l’argent dette

les nouveaux avatars d’un capitalisme débridé

En 1950 : une vision de l ‘an 2000

ATTAC Paris 12

Claude Layalle

4ème edition mars 2018

Avant Propos
l’association ATTAC, dès sa création a fondé son action sur l’analyse autant que sur l’action. Pour s’en convaincre, il suffit de relire l’éditorial de Ignacio RAMONET paru en décembre 1997 dans les colonnes du Monde Dip : Le texte n’a pas pris une ride et l’évolution constatée ces vingt dernières années a démontré la pertinence de l’analyse. Tandis que la crise sociale s’approfondit nous sommes de plus en plus sollicités par l’action, en réaction aux attaques brutales du néolibéralisme qui nous conduit droit dans le mur et cette situation défensive est peu propice à une mobilisation continue et soutenue. Pour ne pas perdre le fil du combat, nous devons comprendre par quel enchaînement nous voyons aujourd’hui ressortir des idéologies que l’on croyait oubliées depuis le XIXe siècle sur le droit du travail ou se perpétuer des guerres d’un autre age dans ce moyen orient berceau de notre civilisation où furent inventé l’écriture et les mathématiques il y a quelque 33 siècles. Ce survol de l’évolution de notre système économique depuis la fin de la seconde guerre mondiale n’est ni un cours magistral, ni une profession de foi : Juste une contribution loin d’être exhaustive à la compréhension des choses que le présentateur souhaite partager mais qui reste évidemment ouverte à un débat ou les questions posées pourraient bien être plus importantes que les opinions exprimées.

Au siècle dernier, vers 1950, le monde était peuplé de 2 milliards d’habitants et ses ressources paraissaient illimitées. L’industrialisation, le développement des sciences et des technologies ouvrait des horizons sans limites à l’imagination. L’idée qu’on se faisant de la société de l’an 2000 en 1950 soulignait la croyance populaire que le progrès nous amènerai un monde meilleur bâti sur une domestication parfaite des ressources de la planète.

On n’était pas chez les bizounours : On travaillait dur, un rapport de forces s’établissait dans les luttes sociales de cette période qu’un économiste libéral mal avisé1 a appelé « les 30 glorieuses ». Il y avait eu 1929 et la grande dépression nord américaine gagnant toute la planète, puis en France le front populaire et 1936, puis encore la guerre et sa conclusion par une victoire à l’américaine tandis qu’un autre champ de discorde démarrait avec la guerre froide.

C’est ici que notre histoire commence.

Après la guerre, la population mondiale s’est accrue jusqu’à 7 milliards en 2011, des consommateurs potentiels pour les plus fortunés . Un productivisme acharné s’est développé sur la partie industrialisée du monde , prenant pour modèle le libéralisme économique développé dans le nouveau monde Nord Américain 2.

Pourtant, le phénomène libertarien3, base de l’ultra-libéralisme n’aurait pu se répandre aussi complètement sur toute la planète sans l’intervention du complexe militaro industriel étasunien4 dans les condition d’aménagement de la paix et de la reconstruction.

Encore en gestation dans la première guerre mondiale ou les USA sont intervenus assez tardivement, ce complexe s’est développé pendant la seconde guerre mondiale, avec une mobilisation économique qu’il était nécessaire dans l’intérêt de l’industrie étasunienne de maintenir et développer dans la paix comme dans la guerre : D’où les efforts déployés pour d’une part prendre le contrôle du système monétaire et par ailleurs désarmer toute prétention des états à contrôler leurs échanges transfrontières.

des règles commerciales sur mesure

A la sortie de la guerre, en 1948, les pays de l’ONU nouvellement créée ont signé – y compris le gouvernement américain – la Charte de la Havane, une réglementation pour l’ouverture d’une Organisation Internationale du Commerce (OIC) reprenant en gros l’organisation d’avant guerre avec un commerce international géré et régulé par les états soucieux de préserver leurs intérêts locaux dans les échanges.

Manipulé par le CMI étasunien, il n’y aura pas de majorité au congrès US pour le ratifier. Le projet d’OIC sera abandonné en 1950 pour faire place à 50 ans de négociations multilatérales dans les GATTs, négociations démarrées en fait depuis 1945, aboutissant en 1994 aux accords de Marrakech et en 1995 à l’ouverture de l’OMC. L’accord multilatéral sur l’OMC va œuvrer à la suppression de tout obstacle au libre échange, autrement dit piloter l’élimination des états dans les processus de régulation des échanges : les états les plus faibles y perdront la possibilité de protéger les économies locales qui n’est pas totalement éliminée mais qui devient de facto une dérogation durement négociée.

Le dollar vaut de l’or

Avant même la fin de la guerre, en 1944, les futurs vainqueurs ont mis sur pieds à Bretton woods un nouveau système monétaire international remplaçant le système multipolaire qui a volé en éclat en 19295 : ce système établit la suprématie du dollar dans le monde.

Selon une étude américaine menée en 2016 6 à laquelle ont participé des chercheurs du Centre de Recherches Historiques de EHESS, et de la BCE, le système de Bretton woods n’aurait pas été conçu pour assurer sa propre régulation et sa propre survie mais pour être en conformité avec les objectifs et la politique des états unis à la fin de la guerre.

Pour obtenir l’accord de leurs alliés, les USA proposaient d’appuyer le système sur l’or, référence universelle, en y accolant le dollar au taux fixe de 35 $ l’once 7.

28 ans plus tard, en 1972, les états unis démonétisaient l’étalon or, rendant toutes les monnaies flottantes autour du dollar, lui-même libéré de tout repère fixe.

En théorie, la mise en flottaison des monnaies n’a rien changé puisque les règles du système était depuis longtemps contournées par les USA usant et abusant de la « planche à billets » au service de leurs intérêts militaires et économiques. C’est sans doute pour cette raison que certains économistes affectent de considérer ce décrochage comme un « non événement », Pourtant les conséquences ont été absolument considérables. Le monde capitaliste est spéculatif. Entre autres, cette mise en flottaison des monnaies a mis en mouvement une vague spéculative sans précédents dans les années 70.

Au premier rang des conséquences, il y eut la privatisation des monnaies livrées à la seule loi de l’offre et de la demande. L’autonomie donnée aux banques centrales pour leur permettre d’intervenir sur les marchés a changé un nombre considérable de règles du jeu.

Entre autres conséquences, les états ont dû conclure des accords de stabilisation monétaire face à la spéculation (serpent monétaire, SME et ECU) et subir le développement de la dette puis de la spéculation sur la dette : La situation de la Grèce en est un exemple emblématique.

Cette nécessité de lutter contre la spéculation sera une partie de la justification du projet abouti en 1994 de la création de l’euro, monnaie unique.

Des processus parallèles

Bien que la réforme monétaire ait été bien plus rapide, les évolutions parallèles des règles commerciales et des règles monétaires sont intimement liées, ce qui n’est pas toujours très clairement pris en compte par les annalistes. Il s’agit en fait de deux processus différents sur le même substrat économique.

Le système monétaire est un outil du quotidien qui doit s’adapter au contexte international des échanges. Il repose sur un accord multilatéral de convertibilité des différentes monnaies.

Chaque crise du système monétaire provient systématiquement d’une rupture dans les équilibres financiers des échanges et aura des conséquences non seulement économiques mais aussi politiques et sociales.

D’un système monétaire à l’autre – Le système de Bretton Woods a succédé au système multilatéral qui jusqu’à 1929 reposait sur le dollar, la livre sterling et le franc français, suite à une crise boursière à new york qui, comme le fameux papillon voletant au Brésil8 a semé la tempète sur la planète entière et est considéré comme une des causes de la guerre de 1939-1945. – Avec le système de la Jamaïque qui lui a succédé en 1976 les monnaies sont devenues flottantes, un vrai cadeau pour la spéculation et pour les entreprises transnationales de toute la planète et la principale cause du développement de l’argent dette. – Actuellement on parle beaucoup dans les couloirs du G20 d’une réforme du système monétaire reposant sur une monnaie de référence fixe qui reste encore à inventer. Les désordres monétaires actuels et la dette qui s’accumule font craindre une résurgence de la crise que les états n’auraient plus les moyens de maîtriser.
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Dans cette affaire, certains acteurs sont nouveaux, dont les chinois et quelques autres9 qui n’étaient pas présents dans les décisions à Bretton Woods pas plus qu’a la Jamaïque et revendiquent un rôle actif sur fond de guerre monétaire latente.

Les règles commerciales en cause à l’OMC concernent les échanges transfrontières mais de fait ont une toute autre portée :

On est très loin de la justification première des objectifs de l’OMC reposant sur la théorie de Ricardo sur les avantages comparatifs, autrement dit sur le bénéfice que retirerai chaque état d’échanger librement ses meilleures productions contre les meilleures productions des autres pour que finalement la planète entière bénéficie de ce qui se fait de mieux partout.

Les centres de production dispersés et apatrides des entreprises transnationales ont ôte toute crédibilité à cette justification mais les tenants du libre échange continuent à la maintenir contre vents et marées dans un système taillé pour leur profit.

La mise en application des « 30 glorieuses »

Elle a été progressive : Après la guerre, les états ont dû pratiquer des politiques d’état providence pour soulager des populations exsangues. La reconstruction elle-même soutenait la demande industrielle. Le Plan Marshall financé par les USA apportait des liquidités. Les difficultés de contrôle des changes furent vite contournées par la pratique des eurodollars10, aujourd’hui plutôt employés pour la circulation monétaire dans les paradis fiscaux.

1945-1975 C’est cette période qu’on a appelé « les trente glorieuses11 » pendant laquelle malgré la dureté de certains combats il y avait toujours en final « du grain à moudre » dans des négociations qui permettaient de faire progresser les salaires et les acquis sociaux. Puis la reconstruction touchant à sa fin et suffisamment de frigos installés dans les appartements et de voitures dans les parkings, le rythme de la consommation a eu tendance à baisser, le retour sur investissement aussi : il a fallu trouver d’autres sources de profit.

Tandis que se poursuivaient les négociations dans les GATTs, en Europe le libre échange prenait des voies plus rapides.

L’argument de remplacer la guerre par la compétition commerciale avait de quoi séduire les populations européennes. Il existait d’autres voies vers la paix dont celle préconisée par Winston Churchill dans la création du Conseil de l’Europe, conçu comme amorce d’une fédération européenne des états basée sur la protection des droits de l’homme. Ce n’était pas dans les plans des USA, promoteurs d’une Europe des marchands, dont le Plan Marshall allaient financer l’opération de reconstruction.

Mis à l’écart, le conseil de l’Europe fut néanmoins pérennisé par un traité en bonne et due forme qui réunit actuellement 49 états sur les 50 du continent européen. Il est resté essentiellement une structure d’arbitrage entre les états et leurs citoyens sur la base d’une convention européenne des droits de l’homme et du citoyen.

La course vers la paix, en réalité, s’est paradoxalement concrétisée dans une organisation militaire occidentale, l’Alliance Atlantique (OTAN) créée en 1949 face à l’Union Soviétique du Pacte de Varsovie dans une guerre froide qui durera près de 45 ans.

La soumission des pays européens à la loi des marchés s’établira d’abord par l’organisation de la CECA : communauté charbon-acier puis a partir du traité de Rome en 1957 par la communauté économique européenne (CEE) devenant en 1994 l’Union Européenne, englobant par vagues successives jusqu’à 28 membres du continent.

Pourquoi d’abord la CECA et pourquoi, moins de 5 ans après la fin de la guerre, invita-t-on l’Allemagne vaincue et encore occupée par les alliés à participer à la réorganisation du continent ? – La réponse est limpide : A cette époque, le charbon et l’acier étaient les éléments principaux de la puissance industrielle et militaire … et les réserves les plus importantes de ces matériaux précieux en Europe étaient localisées dans la Ruhr.

Des éléments perturbateurs

Tout aurait été pour le mieux dans le paradis capitalistes si quelques éléments perturbateurs n’étaient venu remettre en cause le fonctionnement du système et son évolution vers le meilleur des mondes libéral.

Le développement des géants industriels américains avait largement rempli leurs poches sans vraiment enrichir le peuple américain et tandis que les milliards volaient très haut dans les hauteurs de l’oligarchie, et que l’on augmentait l’offre pour réveiller la demande12 les salaires stagnaient au plus bas niveau, ce qui a fortement contribué à développer la pratique de la dette.

L’argent dette On fait de plus en plus fortune sur la dette, suivant le principe, très factuel, que ce n’est pas l’argent en caisse qui compte mais la faculté de le faire circuler pour acheter des biens ou des services, autrement dit c’est moins la monnaie que la circulation monétaire qui importe, d’où l’idée qui s’est répandue de faire travailler plutôt l’argent qu’on n’a pas et que les banques sont toutes prêtes à créer le temps d’un prêt. C’est ainsi que l’économie US puis l’économie mondiale se sont mises à fonctionner sur la base de l’argent dette alors que la privatisation de la monnaie a privé les états de la faculté de contrôler la masse monétaire en circulation. Ce sont aujourd’hui de simples règles prudentielles édictées à Bâle par un panel de banques qui empêchent le système de virer au cauchemar, sans éviter que les spéculateurs ne le mette en danger régulièrement en créant des bulles financières qui finissent par éclater.

Aux USA, on emprunte pour tout et n’importe quoi. L’état providence n’est pas la tasse de thé des américains. Il faut de l’argent pour tout, pour se loger bien sur mais aussi pour l’instruction de ses enfants, pour le home cinéma ou encore en cas de chômage ou pour se soigner sous peine de rester à la porte de l’hôpital si l’on n’a pas une assurance privée efficace et coûteuse. L’état fédéral, lui, profitant de son statut particulier dans le système monétaire s’est surtout endetté dans les aventures de la guerre froide et au service des entreprises…

En Europe, c’est différent ou devrait-on dire c’était , l’état a besoin d’argent pour ses services publics et ne peut se financer que sur les marchés d’où un endettement permanent auquel n’échappent dans l’UE que deux catégories de pays : D’une part certains pays du Nord qui ont des ressources particulières comme du pétrole, du gaz ou de la géothermie13 permettant de financer une partie de l’économie sociale ou encore des pays de l’est européen plus pauvres14 qui n’ont que très peu de services publics et pas trop de cotisations sociales pour peser sur leurs dépenses.

Dans des cas extrêmes comme la Grèce et dans une certaine mesure le Portugal la dette a pris un tour catastrophique et les populations sont évidemment les premières à en pâtir mais il est aussi nécessaire de s’interroger sur « à qui profite le crime ».

Dans la réalité, quand il y a dette, il y a créancier. Lorsqu’on dit « les états se financent sur le marché monétaire », il est utile de se rappeler que le marché monétaire est tenu par des banques, notamment les banques européennes les plus prestigieuses. Pour être plus précis, une bonne partie de l’aide que l’Union européenne et les états européens doivent apporter à la Grèce pour ne pas casser la zone euro (encore de la dette!) va aux grandes banques comme BNP Paribas ou la Deutsche Bank pour payer les intérêts de ce qu’elles ont prêté tout en sachant pertinemment qu’elles ne seraient jamais remboursés. La dette accordée à des pays ou des individus trop pauvres pour rembourser est pour les banques un investissement générateur de profits dans des taux d’intérêt payés la vie durant par les emprunteurs

Les conséquences politiques et sociales

Dans aucun des deux processus : le libre échange et le système monétaire, les options politiques des gouvernements concernés n’ont compté. C’est parfaitement cohérent avec le credo néolibéral suivant lequel l’état est le problème, les entreprises la solution. Pour autant, les partis politiques au pouvoir ont-il essayés de résister ?

Enquête à charge et à décharge, en France.

Si de Gaulle prétendait que la politique de la France ne se faisait pas à la corbeille15, son successeurs Georges Pompidou (1911-1974) qui lui succéda en 1969 fut le premier président de la 5ème république à accompagner la démonétarisation de l’or et la mise en flottation des monnaies.

Son ministre des finances de l’époque, Valéry Giscard d’Estaing fut le premier à faire voter une loi donnant l’autonomie à la banque de France pour lui permettre d’intervenir sur le marché financier. Il édicta en principe que l’état n’étant plus maître de la monnaie devait désormais chercher sur les marchés financiers les moyens de financer ses investissements.

Cette disposition s’est étendue à toutes les banques centrales de l’UE en 1994 et la BCE qui les a désormais sous son autorité a reçu les mêmes instructions dans les traités. Avec la montée de la dette, c’est encore sous Pompidou puis sous Giscard d’Estaing devenu Président qu’on a sorti les premiers plans d’austérité.

C’étaient des gouvernements de droite et il ne faut donc pas s’étonner qu’ils aient accompagné le mouvement et accepté l’évolution prise dans ce contexte économique, avec le constat que la politique se ferait bien « à la corbeille » c’est à dire dans les milieux financiers.

Quid de l’attitude de la gauche dans sa volonté d’obtenir l’alternance, puis dans l’exercice du pouvoir ?

En 1972, la gauche était bloquée dans le cadre de la 5ème république. Ni la SFIO moribonde ni le PCF n’avait vraiment profité des événements de 1968, ils avait même pris une véritable raclée politique aux élections législatives de juin 1968.

Pourtant, au congrès d’Epinay, fin 1971, François Mitterrand avec un parti socialiste regonflé par son ambition avait négocié avec le parti communiste un programme commun de gouvernement dans l’hypothèse ou la gauche finirait par accéder au pouvoir. C’est une véritable machine de guerre contre la conception libérale16 qui s’annonce en 1972. Je n’entrerai pas dans un débat encore vivace dans certains milieux : A ce moment, la gauche pouvait espérer restaurer une économie nationale moins dépendante de la finance internationale …. à condition d’en assumer le coût qui passait par une dévaluation favorisant les exportations au moins aussi importante que celle réalisée par le général de Gaulle en 1958 pour sortir de la guerre d’Algérie.

Mitterrand devra attendre 1981, 10 ans plus tard pour gagner les élections et entamer une partie du programme commun sous la forme de 110 propositions dont certaines ne sont pas compatibles avec les réserves financières de la France. Les pays conjugués de la CEE lui rappelleront les accords et traités conclus ensemble pour lutter contre la spéculation toujours présente.

Georges Soros n’a pas encore attaqué la banque d’Angleterre, ce sera 10 ans plus tard mais la spéculation sur les monnaies flottantes menace toujours le système monétaire européen, obligeant les états à flotter de concert : François Mitterrand plombé par le SME ne sera pas autorisé par ses partenaires à réaliser une dévaluation au niveau qui lui aurait été nécessaire, d’autant que, en 1982, l’Allemagne a réévalué le mark de 8% ce qui minore la position de la France dans l’ECU, monnaie de compte commune de la CEE : la France n’a plus les moyens d’une politique à contre courant et en 1983, beaucoup de réformes engagées sont détricotées. Bon gré malgré la France entre dans le rang des autres pays européens pour préparer Maastricht et avec ce traité la création de l’Euro qui met fin à toute possibilité de sortir par la dévaluation de la politique ordo-libérale qui va s’installer.

Elle n’en est jamais sortie et les gouvernements de gauche comme de droite qui se sont succédé par la suite ont tous pris l’allure plus ou moins uniforme d’un social libéralisme au service de l’économie, au delà des rodomontades d’un Sarkozy ou des chatteries d’un Hollande.

Et le peuple, dans tout ça ?

Ce fut bien le cadet des soucis d’un monde politique qui, incapable de contrôler la situation s’est surtout préoccupé d’assurer sa propre survie électorale, devenant de plus en plus hors sol par rapport à un tissu social qui, pour un temps encore fut un peu protégé dans la crise par le bouclier des services publics développé après guerre.

La montée de l’abstention aux élections successives l’avait annoncé, tout comme la montée des nationalismes et des mouvements d’extrême droite : une forme latente de populisme a fini de décrédibiliser des partis politiques minés autant par la corruption néolibérale que par la désaffection d’ailes militantes désappointées.

La société civile n’a pas été épargnée par cette évolution et du syndicalisme de conquête sociale des années 60, on est passé à des stratégies de plus en plus défensives démobilisantes pour les salariés.

Annoncée par les nombreuses crises et particulièrement celle de 2007-2008 dont les dégâts collatéraux sont loin d’avoir disparus, la sanction a fini par tomber en 2016 – 2017 :

D’un point de vue purement analytique, à force de ne pas informer et encore moins consulter les populations, les opinions publiques ont fini par assimiler la démocratie à la perversion des systèmes représentatifs, une tendance intelligemment utilisée par des « lider màximo »17 au petit pied réanimant l’idée d’une autorité centrale discrétionnaire, seule capable de conduire les bonnes décisions, autrement dit d’une forme de fascisme18 latent dans la course à l’élection d’un monarque républicain pour cinq ans.

Cette tendance populiste n’est pas seulement présente en France : elle peut prendre différentes formes dépendant de la culture et de la structure du pouvoir dans le pays ou elle se manifeste : Dans plusieurs pays de l’UE, la montée des nationalistes et de l’extrême droite pourrait bien poser problème dans les années à venir.

Aux USA, la structure fédérale du pays devrait le préserver d’une aventure carrément fasciste et dictatoriale mais la montée des inégalités fait monter comme ailleurs un glissement progressif vers l’extrême droite. Ce glissement est favorisé par un fond culturel cocardier qui entre en résonance avec le truculent Donald Trump, qui ressuscite à sa manière la doctrine Monroe19 du XIXe siècle qui a maintenu le pays dans l’isolationnisme pendant plus d’un siècle.

En France, aux dernières élections présidentielles, balayant les structures traditionnelles, trois types de césarismes basées sur l’adhésion au chef et se réclamant d’un refus de structures politiques dénoncées corrompues ou frappées d’obsolescence sont nées comme recours contre les structures traditionnelles :

  • Le front National, héritier d’une forme de fascisme plongeant ses racines dans les mouvements italiens du début du XXe siècle est un mouvement populiste appuyée sur la culture du chef qui s’est développé principalement sur la carence des mouvements politiques traditionnels. Il a progressé sur la colère d’une partie de la population recherchant dans l’autorité d’un état fort la solution à une crise économique et sociale que ni la droite traditionnelle ni la gauche n’ont su conjuguer. Cela ne signifie pas que la majorité des électeurs FN qui cette fois a été bien prêts d’arriver aux portes du pouvoir sont des fascistes ou même séduit par le fascisme militant mais le FN est cependant et reste le catalyseur d’un mouvement populaire ne voyant pas d’autres moyens que de casser le système pour le faire changer.
  • Le mouvement des insoumis, qui, lui, se réclame de la rupture avec les mouvements de gauche traditionnels trop acquis à la coopération avec les forces économiques n’est pas pour autant un mouvement révolutionnaire : Il s’appuie sur le même refus d’un système formaté par la cinquième république mais les règles établies, à défaut d’une force suffisante pour créer une sixième république conforme à ses vœux, l’ont obligé à pratiquer les mêmes stratégies populistes auprès d’un public qui ne croit plus aux discours faussement rationnels des menteurs politiques professionnels. L’élection passée, perdue mais qui leur confère néanmoins un rôle potentiel d’opposant principal , il leur reste à se donner une structure pouvant supporter leur mouvement, sans renouveler les erreurs des partis traditionnels, en ressuscitant l’idée d’une démocratie réellement citoyenne, plus horizontale, dans un terrain social devenu un vrai chantier de démolition.
  • Le mouvement en marche au delà de tout ce qu’une propagande bien construite peut suggérer (ni de droite ni de gauche) est un mouvement libertarien qui s’appuie sur l’ordolibéralisme pratiqué dans l’Union Européenne par l’Allemagne de Angela Merkel. A la différence de Donald Trump (mais le fond culturel est différent) Macron ne s’appuie pas sur un nationalisme étroit mais sur la construction européenne en proposant comme à l’accoutumé plus encore de libéralisme pour pallier aux échecs du libéralisme. Autre différence, la doctrine Trump est plutôt protectionniste (mais attendons de voir) ; Ce qu’on voit apparaître de la politique Macron est plutôt libre échangiste, sur un modèle plus proche des démocrates américains.

Le génie des promoteurs du mouvement « en marche » aura été de valoriser les politiques passées en les faisant passer auprès d’un certain public comme en rupture avec le système. Échaudé par tant d’années de bobards en matière d’arguments politiques, il n’est pas sur que ce public soit réellement prêt, toutes réflexions faites, à accepter le retour aux règles sociales du XIXe siècle que les réformes engagées nous préparent mais le pouvoir actuel est là pour cinq ans.

Les deux prochaines années du quinquennat Macron, avant que l’intéressé ne songe à sa réélection et doive à nouveau compter sur les opinions publiques seront décisives : c’est à ce moment qu’on mesurera le chemin parcouru dans une régression sociale baptisée réforme par ceux qui en profitent.

La suite ….

Resumons nous : Début 2018, et bien que tout nous indique que nous sommes à la fin d’un cycle, le monde continue à tourner comme avant, l’économie aussi : sur le fil du rasoir d’Ockham20 matérialisé par le libre échange, instrument d’une industrie financière hautement spéculative avec un système monétaire flottant qui permet et facilite ce fonctionnement spéculatif.


Nous vivons dans une sphère économique dominée par des constructions virtuelles s’appuyant sur des techniques de marketing et une application ciblée des sciences sociales. Les plus fortes mobilisations boursières appartiennent aux GAFAs21. On ne construit plus de pyramides mais les remplacent de grands travaux financés à grand coup de fonds publics, inutiles et souvent contraires à l’intérêt général. La principale fonction des décideurs semble être d’orienter la circulation monétaire dans la mauvaise direction tout en générant toujours plus de dette. Le « miracle » informatique est aussi un puissant adjuvant pour une activité financière de moins en moins liée au développement d’outils utiles à la population. La programmation des applis les plus folles vient renforcer tous les jours un peu plus la manipulation sociale d’une marchandisation qui ne repose plus que sur des désirs préfabriqués.

Derrière l’écran d’un discours policé à base de manipulations médiatiques, ce que Alain Damasio22 appelle joliment « une dictature douce » s’est installée. La société finit par l’accepter sans trop questionner les stratégies de privation de libertés et de suppression des comportements « non conformes » qu’elle implique.

Le problème, c’est que cela ne marche pas : La planète, notre milieu de vie naturel se dégrade tous les jours un peu plus. Il ne fait plus de doutes, sauf pour quelques irréductibles que le dérèglement climatique déjà fortement perceptible est d’origine industrielle, donc humaine, et que seule une remise en cause du système économique actuel pourrai nous éviter ou éviter à nos enfants de bouillir ensemble dans le chaudron surchauffé d’une atmosphère saturée de GES.

Sur le plan économique, cela ne va pas mieux : Il n’y a guère de nouvelles places industrielles à investir même en continuant à piller les dernières ressources disponibles. Les politiques d’austérité menées un peu partout tendent à nous ramener à la situation sociale du XIXe siècle en détruisant les solidarités encore existantes et les structures publiques qui les soutiennent. L’enrichissement de l’ « upper class » matérialisé par la progression des indices boursiers ne peut se poursuivre qu’au prix de l’accroissement des inégalités et de l’appauvrissement des plus pauvres.

On est certes encore, la plupart du temps, loin du seuil minimum de subsistance défini au XIXe siècle par Ricardo encore que dans certains recoins de la planète on puisse encore mourir de faim et qu’en France même il existe des salariés SDF mais il est évident dans les pratiques de certaines entreprises que c’est bien un objectif qu’elles incluent dans leurs stratégies, notamment par les délocalisations des centres productifs.

Le prix naturel du travail Dans un ouvrage édité en 1817 “De la valeur”des Principes de l’économie politique et de l’impôt23, David Ricardo explicite la notion de « salaire de subsistance » d’un ouvrier qui pour lui est le prix naturel du travail: Le “prix naturel du travail” est “celui qui est nécessaire pour permettre globalement aux travailleurs de subsister et de perpétuer leur espèce sans variation de leur nombre” [..]. Il dépend “de la quantité de nourriture, de biens nécessaires et de biens d’agrément qui leur est devenue essentielle par la force de l’habitude”.[..] Le “prix naturel du travail” permet, en effet, d’acheter à des prix donnés un panier de biens [..] qui comprend la nourriture et les biens nécessaires (“food and necessaries”) et des biens d’agreement (enjoyments). Le travailleur peut ainsi accéder à une « aisance modérée » mais sans biens de luxe. Il n’épargne pas, car l’épargne vient du profit.

Y a-t-il une sortie ?

Bien entendu ! Mais, vers le haut ou vers le bas ?

Difficile de répondre, car comme de nombreux humoristes l’ont remarqué, ce qui est le plus difficile à prévoir, c’est l’avenir, mais l’avenir est souvent le résultat de décisions prises dans le passé et dans le présent : ainsi la période actuelle est-elle particulièrement propice à la réflexion.

Depuis maintenant soixante dix ans nous suivons une piste dont la direction et les premiers kilomètres ont été tracés en fonction des objectifs des vainqueurs de la guerre, pour s’imposer comme le seul chemin possible pour une grande partie de l’humanité.

Les faits sont là : l’abus de recherche de profit pour les uns et le confort du progrès pour les autres ont conduit à galvauder notre environnement au point de craindre pour son avenir et à laisser croître les inégalités hors limites du supportable.

Certains d’entre nous ont peut-être entendu les avertissements du Club de Rome en 1972 24 alertant sur les dangers du productivisme poursuivi pendant les trente glorieuses et demandant une limitation substantielle de la croissance face aux dangers écologiques, mais c’était déjà trop tard :

En 1972, la population mondiale avait déjà augmenté de 50% par rapport à 1945 et elle doublera encore après l’an 2000. Le démarrage hyper actif de l’industrie financière avec la mise en flottaison de la monnaie va pousser encore plus le pillage de la planète par l’extractivisme et la course à la productivité : le tout entraînée par le libre échange et la concurrence effréné de tous contre tous, sans compter la pollution mortifère des GES.

Le mal est fait, alors comment réparer , comment faire évoluer une situation écologique dont la COP 23 vient encore de rappeler la gravité et une situation économique dans laquelle il ne manque pas d’indicateurs pour signaler une probabilité croissante de nouvelles crises ?

Il ne faut pas compter trop sur le système économique pour se réformer lui-même. La prise en compte d’un intérêt général n’est pas dans son logiciel : Aujourd’hui, pour les industriels de la planète, l’économie « verte » est une stratégie permettant de générer de nouveaux profits dans des conditions nouvelles. Ils rêvent de marchandiser la nature et certains d’entre eux dépensent des sommes considérables pour prendre le contrôle de la recherche médicale, pour le contrôle et la commercialisation du génome humain. La « révolution numérique », en plus d’être une source de profit considérable, désocialise les individus au point de les déconnecter du reste du genre humain : Il suffit de jeter un œil sur les passagers accrochés à leur smartphone dans le métro d’une grande ville pour s’en rendre compte.

Alors qu’aux USA les mines de charbon rouvrent avec la bénédiction de Donald Trump, partout dans le monde les extractivistes mobilisent leurs circuits lobbyistes pour freiner les initiatives des états. Les traités de libre échange qui se généralisent un peu partout sont de véritables usines à fabriquer du droit pour les transnationales et pour les investisseurs, leur permettant de bâtir leurs empires sur les territoires au mépris du droit des états et des populations.

Le réseau bancaire asservi aux intérêts de la finance est aussi la corde qui nous pend à la circulation monétaire au quotidien, dominant la vie d’une société et des individus qui la constituent.

La dictature du système s’impose partout et la réponse ne peut être que politique : La société doit reprendre ses droits sur son développement et sur son organisation y compris économique. Oui mais comment ?

Chez les altermondialistes, y compris à ATTAC qui depuis 20 ans combat le néolibéralisme, on a fait de nombreuses propositions, toutes pertinentes mais qui peinent à percer dans un univers médiatique pour l’essentiel aux mains de l’oligarchie qui en est propriétaire.

Par exemple :

  • Taxer les revenus spéculatifs : c’est la fameuse taxe Tobin
  • rendre la monnaie aux services publics : ce qui supposerai de revenir sur la flottaison des monnaies et de contrôler à nouveau les banques centrales
  • exercer un contrôle sérieux sur le réseau des banques et séparer réellement les banques de dépôt des banques d’affaires
  • réintégrer dans le cadre de l’ONU le fonctionnement de l’OMC en redonnant aux autorités publiques des pays une autorité effective sur les échanges transfrontières pour protéger les économies locales
  • Etablir un moratoire sur les accords de libre échange
  • Forger dans le cadre de l’ONU une autorité mondiale de l’environnement avec des extensions dans les états et les territoires chargées de gérer de façon coordonnée la transition énergétique et de mettre fin aux emprises extractivistes
  • Rétablir un contrôle efficace des états sur l’activité des filiales des multinationales sur leur territoire et veiller en particulier à ce qu’elles mettent fin à l’évasion et à l’optimisation fiscale
  • ….

Depuis quelques temps, de nombreuses expériences de monnaies locales se sont développées qui pourraient aider à créer autant de circuits économiques courts à l’abri de la spéculation et de la mainmise des multinationales, aidant à la relocalisations, mais nous avons besoin aussi d’une monnaie commune sous contrôle onusien.

Le contrôle onusien malgré tous ses défauts est souvent considéré, comme le plus représentatif de l’ensemble des territoires de la planète, un forum ou les décisions en AG se prennent en fonction de « un peuple une voix » plutôt que suivant la loi dollar mais bien sur il y aurait beaucoup à faire pour améliorer son fonctionnement.

Vaste programme ! Et qui demanderai une volonté politique commune difficile à imaginer, mais il n’est pas interdit d’espérer que pays par pays des convergences dans les actions militantes finissent par faire apparaître des changements significatifs dans les comportements économiques . L’urgence climatique devrait faciliter certaines décisions mais on peut craindre à juste titre que l’autisme manifesté par les milieux financiers sur ces sujets ne conduise à des situations devenant irréversibles par manque de prise en charge.

Pour un renouveau démocratique

De même qu’au niveau général, les solutions ne peuvent être que politiques, au niveau de chaque état la reprise du développement de projets politiques ne peut être que citoyenne.

La déconsidération de la démocratie représentative remarquée dans les corps électoraux a de quoi inquiéter : la tendance de certains publics pour des solutions populistes pourrait déboucher sur des systèmes plus autoritaires d’autant que d’autres phénomènes entraînent dans de nombreux pays une certaine militarisation de leur système répressif : les lois d’urgence indéfiniment renouvelées ou commuées en lois permanentes s’appliqueront (tôt ou tard) plus aux manifestations militantes d’opposition qu’à des menaces terroristes par nature évanescentes.

Les responsables politiques devront trouver un moyen de renouer avec leur base naturelle de citoyens qui leur ont clairement rappelé, particulièrement en France une tendance anti-système par une abstention massive ou un vote franchement populiste.

Dans des communautés aussi complexe que les nôtres, la démocratie n’est pas pensable sans un minimum de représentants : On ne peut mettre en même temps plusieurs chauffeurs différents au volant d’un même véhicule. Pour remonter des partis représentatifs, ils devront inventer une représentation plus horizontale, s’appuyant plus sur un échange citoyen s’ils veulent retrouver la confiance des électeurs. S’ils n’en sont pas capables, il est difficile de prévoir quel type de populisme prendra le pouvoir.

Les citoyens français, eux, sont à la croisée des chemins : Ils ont décidé en 2017 de choisir un leader se réclamant d’un libéralisme à l’américaine qui, précisément aux USA vient de perdre une bataille électorale. S’ils confirment leur choix aux prochaines élections, municipales et européennes, puis au prochain quinquennat, la France sera définitivement accrochée au train européen, pour le meilleur et pour le pire, sans beaucoup d’espoir de retour ni d’évolution.

Paris, mars 2018

contact claude.layalle@laposte.net

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Annexe : 10 Définitions essentielles

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Libre échange :

Au départ : C’est un système économique qui prône la libre circulation des produits et services au sein d’une même zone géographique par la suppression des barrières douanières (droits et taxes) et de tout ce qui peut entraver le commerce.

Depuis 1945 et devenu loi générale avec l’OMC : C’est la libre circulation mondiale des capitaux, investissements, produits et services par l’abattage des barrières tarifaires et non tarifaires. Toute exception est dérogatoire. Les ALE visent à supprimer ces exceptions et même à punir les états qui y auraient recours.

Mercantilisme :

Doctrine économique : La puissance d’un pays est fonction de ses réserves souveraines (or, argent, dollars …), d’ou une politique de soutien au développement local et de capacité d’exportation : protectionniste, le mercantilisme est incompatible avec le libre échange.

Protectionnisme :

Politique et pratiques d’un Etat qui intervient dans l’économie afin de défendre ses intérêts et ceux de ses entreprises face à la concurrence étrangère et maintient ou développe ses propres forces de production  : a ne pas confondre avec l’isolationnisme qui a aussi une composante politique de refus des échanges..

Keynesialisme :

Keynes était un libéral. Sa doctrine : la demande est le facteur déterminant du niveau de production et donc de l’emploi. Il s’oppose à l’hypothèse néolibérale suivant laquelle c’est la politique de l’offre qui définit la santé économique, d’où la surconsommation, le surendettement et les obstacles sur le chemin d’une transition écologique.

Monétarisme :

Pour le monétariste, la monnaie instrument d’échange est neutre . Pour éviter l’inflation, la masse monétaire ( y compris celle des crédits en cours) doit être contrôlée et progresser au même rythme que la production. L’inflation augmente la valeur affichée des produits, pas leur valeur intrinsèque représentant les efforts de production ou les ressources primaires utilisées. Le monétarisme a été jeté aux orties par la mise en flottaison des monnaies.

Système monétaire international :

Le système monétaire international est un ensemble de mécanismes qui gouvernent les multiples interactions entre les différentes monnaies et les différents instruments de crédit des pays. C’est en principe le FMI qui en a la charge, un organisme international ou les USA sont majoritaires et l’équilibre des monnaies se fait autour du dollar qui, depuis 1972 n’est plus rattaché à l’or . Avant 1972, les états intervenaient à travers leur banque centrale sur la valeur de leur monnaie par rapport à leurs réserves en or ou en dollar convertible25. Après 1972, une fois l’or démonétisé et le dollar flottant, la valeur des monnaies ne dépend plus que du marché monétaire, de la loi de l’offre et de la demande et l’état en est dessaisi.

La spéculation :

deux définitions différentes : Dans le domaine économique, la spéculation est le fait de prendre aujourd’hui des décisions sur la base d’un état économique futur et hypothétique afin d’en retirer un avantage. Dans le domaine de la finance, la spéculation est une opération financière qui consiste à tirer profit des fluctuations des prix du marché afin de réaliser des plus-values plutôt que de satisfaire aux besoins d’une activité réelle.

L’industrie financière :

C’est un néologisme mal nommé mais figuratif de l’activité de gagner de l’argent avec de l’argent. Les conséquences économiques ou sociales sont des externalités : autrement dit c’est de la spéculation financière.

L’argent dette :

La monnaie telle qu’on l’entend, ce sont des billets qu’on échange ou sous sa forme moderne des lignes de code qu’on transfère par votre carte de crédit de votre compte à celui de votre débiteur. L’argent dette, c’est une monnaie transitoire, créée ex nihilo par une banque pour satisfaire un prêt, qui aura cours et qui va circuler tout comme une monnaie normale pendant la durée du prêt puis qui va disparaître au moment du remboursement.

Comme il y a sans cesse des prêts et des remboursements, il y a un flux constant de circulation monétaire . Dans un état quasi général d’endettement ce flux d’argent dette est très supérieur à la circulation monétaire dite normale matérialisée par la paie qu’on touche au début du mois et qu’on dépense dans le mois.

Dette publique :

Depuis 1972, ce sont les banques privées qui ont le monopole (et le bénéfice) de la création monétaire par le prêt aux états comme aux particuliers. Les banques centrales ne prêtent pas aux états : elles n’ont en principe que le rôle de prêter aux banques privées en dernier ressort pour réguler la circulation monétaire disponible et intervenir si nécessaire sur les marchés pour éviter l’inflation.

Les états empruntent donc sur les marchés monétaires pour leurs investissements26 et paient au banquier des intérêts sur la durée du prêt : ce sont ces intérêts (qui engraissent le banquier et ne fournissent rien en retour à l’état) qui font grimper la dette publique d’année en année27

Pour l’essentiel, ces définitions sont tirées ou adaptées du dictionnaire « la toupie » en ligne sur le web.

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1C’était Jean Fourastié, dans un livre paru en 1979 sous le titre « Les Trente glorieuses ou La révolution invisible de 1946 à 1975 », un livre à la gloire du redressement économique et du libéralisme ascendant.

2Un développement lié aussi aux grands espaces opportunément libérés des populations amerindiennes repoussées toujours plus à l’Ouest. Le débat sur ce point serait tout à fait hors sujet, mais c’est une réalité qu’il était néanmoins nécessaire de mentionner.

3Le libertarianisme, concept des lumières défendu par John Locke sur la liberté individuelle, droit naturel, est en faveur d’un droit de propriété sans restrictions et du libre échange, autrement dit pour un système capitalistique du « laisser faire » qui considère uniquement les rapports sociaux entre individus et par extension entre les groupes mais sans aucune considération d’un quelconque intérêt général. C’est l’idéologie de l’école de Chicago à laquelle appartenait Milton Friedman ou encore avec quelques nuances l’école de Vienne avec Friedrich Hayek ou Murray Rothbard.

4Le complexe militaro-industriel (il en existe chez d’autres marchands d’arme notamment en Europe) n’est pas seulement un groupement d’industriels lobbyistes corporatiste comme BusinessEurope ou régional comme l’ERT : C’est un vaste réseau de procédés et relations financières, qui inclut non seulement les marchands d’armes et de services mais les législateurs, l’industrie dans son ensemble, les finances et bien entendu la sécurité nationale et les services de renseignements dont on connaît l’implication aux US dans la vie politique.

5Jusqu’en 1929, le système monétaire reposait sur l’or, monnaie de référence appuyée sur le dollar, la livre sterling et le franc français. Le « jeudi noir de 1929 » à wall street fera éclater ce système et les monnaies flotteront avec le dollar américain jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale ou les accords de Bretton woods rétabliront un certain équilibre des monnaies, jusqu’à ce que la décision de Nixon en 1972 rompe cet équilibre.

6https://enseignements-2016.ehess.fr/2016/ue/198/

7L’once d’or cotée pèse 31,1034768 grammes

8L’effet papillon. En 1972, le météorologiste Lorenz posait la question : « Le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ? » et développait sur ce thème la théorie du chaos.

9Les BRICS ( Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud)

10Les eurodevises, dont l’eurodollar est un cas particulier, sont le moyen de générer une monnaie fictive dans un pays ou la monnaie légale n’est pas en cours : Matérialisées par des certificats délivrés off shore négociables et adossés à des liquidités réelles restant dans le pays d’origine, elles sont gérées par des réseaux de banques privées : la FBE quand émises de la zone européenne ou encore la BBA partout ailleurs hors de l’UE. Assimilables à des prêts internationaux privés qui échappent au contrôle des autorités financières publiques, les eurodevises sont assujetties, suivant le cas aux taux d’intérêt de l’EUROBOR ou du LIBOR.

11Ibid

12Cette théorie défendue par Jean Baptiste Say et mise en pratique par les ultra libéraux fut et est toujours combattue avec acharnement par Keynes et par les économistes sérieux.

13Comme le Dannemark, la Suède ou les pays bas

14Comme la Pologne, la Roumanie ou la Lettonie

15C’était en 1966 alors que le gouvernement avait encore la maitrise de sa monnaie

16Avec d’importantes nationalisations et le retour de la planification démocratique …

17En français : « grand chef »

18 Fascisme : d’après le dico :système politique reposant sur un chef providentiel incarnant la masse des citoyens pour peu que la structure du pouvoir lui permette de l’exercer de façon totalitaire.

19James Monroe (1758-1831) était Président des USA républicain juste avant la guerre de Sécession à une époque ou le continent américain était l’objet de nombreuses convoitises de la part de nombreux pays européens et la doctrine Monroe était une doctrine d’exclusion prônant l’isolationnisme de la jeune nation américaine à l’égard des influences politiques nombreuses qui pesaient sur elle. Ce qu’exprime Donald Trump, anarcho capitaliste dans un monde dominé par l’ultra libéralisme, c’est une méfiance marquée pour la partie du réseau transnational qui n’est pas sous influence directe des USA et taille parfois des croupières à l’oligarchie locale dont il s’est institué le représentant.

Ses prédécesseurs républicains pratiquaient plutôt une forme d’impérialisme mondialisé alors que les démocrates s’appuyait plutôt sur un néolibéralisme généralisé dans le réseau mondial des multinationales.

20Plus de détails dans « le rasoir d’Ockham », balade citoyenne dans l’histoire de l’après guerre, 2017, auteur Claude Layalle éditeur Edilivre.

21Les multinationales de l’économie numérique : Google, Apple, Facebook et Amazon

22Alain Damasio : auteur de SF. « La zone du dehors » est son œuvre la plus évocatrice dans une novlangue que n’aurait pas démenti Orwell.

23Titre original de l’édition anglaise : « On the Principles of Political Economy and Taxation » de David Ricardo, celui dont la théorie sur « les avantages comparatifs » est la base de la justification du « libre échange » imposé par l’OMC.

24Club de Rome : Piloté à sa création par Aurelio Peccei, un Italien membre du conseil d’administration de Fiat et par Alexander King, membre de l’OCDE, un forum ou s’établissent les normes de fonctionnement du système libéral.

25Exemple : de Gaulle dévalue le franc de 17% en 1958 pour rétablir la balance commerciale française

26par le mécanisme des bons du trésor qui ne sont en fait que des reconnaissances de dettes d’un état.

27En 1972 pratiquement zéro de dette publique française. En 2016 environ 100% du PIB.

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